Le groupe de Tarnac doit-il être jugé pour terrorisme ? C’est la question sur laquelle va se pencher le mercredi 25 mai la chambre d’instruction de la Cour d’appel de Paris.
En août 2015, la juge d’instruction Jeanne Duyé a abandonné la circonstance aggravante « d’entreprise terroriste » à l’encontre de trois militants soupçonnés d’être à l’origine de sabotages de lignes SNCF sur des caténaires en Seine-et-Marne, dont Julien Coupat, le leader présumé du groupe. Les juges ont également ordonné un non-lieu pour les dégradations commises contre la voie TGV à Vigny (Meurthe-et-Moselle) entre le 25 et le 26 octobre 2008, reprochés à Julien Coupat et Gabrielle Hallez.
Le parquet de Paris a fait appel de la requalification et du non-lieu, à contre-pied de ses réquisitions dans lesquelles il décrivait un « basculement dans le terrorisme » du groupe de Tarnac. La Cour d’appel devra donc trancher.
Renvoi en procès
Dans leur ordonnance, les juges estimaient que malgré « le dessein patent de désorganiser le fonctionnement d’un rouage considéré comme étatique, la SNCF » et au-delà du préjudice, du trouble à l’ordre public et des désagréments pour les usagers, « ces actions ne sauraient être considérées, malgré la rhétorique guerrière employée, comme ayant, à un moment ou à un autre, intimidé ou terrorisé » la population, dans les conditions définies par le code pénal pour entrer dans le champ du terrorisme.
Si les juges ont ordonné un non-lieu pour les sabotages à Vigny, ils ont néanmoins renvoyé en procès trois membres du groupe de Tarnac pour association de malfaiteurs. Ceux-ci sont accusés d’avoir dégradé des lignes TGV à Dhuisy (Seine-et-Marne), mais nient les faits. Cinq autres seront jugés pour des faits de faux ou de refus de prélèvement d’ADN.
Me Marie Dosé, l’avocate de Yildune Levy et Gabrielle Hallez, et Me Jérémie Assous, revenu dans l’équipe de défense de Julien Coupat, comptent réclamer un non-lieu général. « Nous demandons également des compléments d’informations, car nous estimons que l’instruction a été incomplète et impartiale », assure Jérémie Assous.
Peu de preuves
Depuis sept ans, l’affaire Tarnac a connu de multiples polémiques et rebondissements. Le week-end du 10 novembre 2008, plusieurs dégradations sur les lignes TGV avaient provoqué des retards pour des milliers de passagers. Elles avaient ensuite été imputées au groupe de Tarnac, une cellule décrite par l’ex-ministre de l’intérieur Michèle Alliot-Marie comme appartenant à « l’ultra-gauche, mouvance anarcho-autonome ». Le gouvernement de l’époque a été accusé d’instrumentaliser cette affaire, survenue peu de temps après la création de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) par Nicolas Sarkozy.
La mise en examen de Julien Coupat et de sa compagne repose sur un procès-verbal de filature dressé par la DCRI dont la défense a toujours contesté la véracité. En réalité, la justice ne dispose que d’un seul fait concret, la pose du crochet de la caténaire. Le parquet de Paris s’appuie quant à lui sur un pamphlet signé par le Comité invisible, « L’Insurrection qui vient », qu’il attribue à Julien Coupat. Le texte fait l’apologie du sabotage pour « finaliser la chute de l’État ». Julien Coupat nie néanmoins en être l’auteur.