Tarnac. Nicole Borvo : « Une atteinte manifeste à la présomption d’innocence »

11 février 2009
Nicole Borvo

Aujourd’hui, Julien Coupat, le principal inculpé dans l’affaire des sabotages des lignes à grande vitesse, doit être à nouveau entendu par le juge d’instruction. C’est cette nouvelle demande d’audition qui avait justifié fin janvier le rejet de sa remise en liberté. Son avocate, Irène Terrel, compte donc bien, dans la foulée, renouveler sa requête pour que la dernière personne incarcérée dans l’affaire de Tarnac puisse sortir de prison. La sénatrice communiste Nicole Borvo nous livre son point de vue.

Les politiques sont rares à s’exprimer sur Tarnac. Pourquoi apportez-vous, à l’instar de Patrick Braouzec ou Jack Ralite, votre soutien aux inculpés de Tarnac ?

Nicole Borvo. Il est vrai que les politiques renâclent à s’immiscer dans une affaire qui est entre les mains de la justice. Toutefois, dès le 28 novembre, j’ai tenu à m’exprimer sur le sujet. D’abord parce qu’il est inacceptable et attentatoire aux droits les plus élémentaires de la personne – à commencer par la présomption d’innocence – de voir des gens se faire arrêter sous l’oeil des caméras et avec, en quasi-instantané, les commentaires de la ministre de l’Intérieur. Ensuite parce qu’on utilise là à tort le terme de « terrorisme ». Jamais la vie de quiconque n’a été en danger dans une affaire où il n’y a, au pire, qu’une atteinte aux biens. D’autant que les preuves semblent on ne peut plus minces. Apparemment, on ne peut reprocher aux inculpés que de s’être retrouvés à proximité de lignes à grande vitesse ou dans certaines manifestations. D’ailleurs, toutes les personnes arrêtées ont depuis été libérées. Toutes, sauf Julien Coupat. Si l’on avait vraiment affaire à une bande de terroristes, cela serait inquiétant. Voilà pourquoi je réclame sa libération.

Pour vous, cette affaire n’arrive pas par hasard…

Nicole Borvo. Évidemment non. La criminalisation des mouvements sociaux – et au-delà de tout ce qui dérange l’ordre établi – ne cesse de s’aggraver. Ce n’est hélas pas étonnant : quand on vote des lois d’exception instaurant une suspicion généralisée et stigmatisant des catégories entières de la population (les jeunes, les étrangers…), il faut s’attendre à ce qu’elles soient appliquées. Qui plus est dans une période de crise. Malheureusement, en la matière, Nicolas Sarkozy n’a rien inventé et ça n’a pas commencé avec l’affaire de Tarnac : il est classique de voir le pouvoir tenter ainsi de détourner les colères et de susciter les craintes et la suspicion.

Au-delà de la libération de Julien Coupat, que réclamez-vous ?

Nicole Borvo. Qu’on revienne sur cette législation d’exception que sont les lois antiterroristes et qu’on ne parle de terrorisme qu’en cas d’atteintes aux personnes. Rien ne justifie ces qualifications. Et rien ne justifie non plus qu’aucune visite à Julien Coupat n’ait pu être autorisée depuis son incarcération.

 

Entretien réalisé par Sébastien Homer

Publié par l’Humanité

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